Juillet 2021
Read MoreSonges d'un Soir d’Été
Quand j'étais petite – et même moins petite, en âge – j'habitais en Alsace. Un plat pays où se devinaient à l'horizon, les jours généreux, les lignes bleues des Vosges et de la Forêt Noire. Les vacances marquaient des césures dans l'univers citadin saturé d'occupations, des parenthèses campagnardes chez mes grands-parents. Quand venait l'été, c'était le grand départ, le départ vers les Montagnes. Une escale dans les premières collines du Jura, quelques anniversaires familiaux, ... et voilà qu'un beau jour, dans une Clio bleue bourrée jusqu'aux fenêtres, le coffre rempli par la grosse tente igloo, quelques cassettes audio préparées pour la route, on s'exilait vers le Sud. La météo dictait nos destinations. Souvent, nous commencions par Chamonix, avant de descendre en Oisans puis à Vallouise en quête de temps clément.
Me revoilà aujourd'hui sur cette route des vacances. Je n'ai aucun souvenir qu'à l'époque nous passions par Grenoble, mais toujours l'enfilade austère qui suit se refait familière. Il y a cette ville terne, puis ce fond de ravin oppressant. En contrebas, de larges bâtisses à l'abandon, bétonnées, grisâtres. L'on longe ce bâtiment patibulaire et biscornu où des films ont été tournés. Arrive un gros rocher au profil de visage pétrifié, agrémenté de son panneau "tête de Louis XVI".
La vallée étriquée en rejoint une autre, un peu moins encaissée. Des mille-feuilles de strates tordues rongées de sapins noirs jaillissent sur les côtés. La route file tout droit vers Bourg-d'Oisans. Il y a toujours cette petite place où des trampolines étaient montés et où rebondissaient des enfants excités. Le resto-bar avec les magasins de grigris juste en face. Les affichages indiquant le musée aux cristaux et la Maison du Parc. Ce parc où nous mangions parfois une pizza le soir en regardant le crépuscule. J'imagine le glacier dans la rue pavée, celui où nous prenions toujours nos cornets aux boules colorées en revenant de rando. Et l'office du tourisme, au bord du torrent, avec sa feuille A4 indiquant la météo. Là-haut, à La Garde, au bord du vide, la maison du camping où nous dormions. Plus haut encore, la station de l'Alpe d'Huez. Gamine, la nuit, ses lumières me semblaient si hautes que je les imaginais suspendues dans le ciel.
Puis c'est la montée vers le Chambon et son barrage – et ses éboulements. La Meije est toujours aussi majestueuse, enclose de ses glaciers hérissés de pics et croulants de séracs. Des vallonnements herbeux s'accaparent les pentes charbonnées d'ardoises, ébouriffées de parcelles de forêts. Au loin, tout en bas, les eaux tumultueuses grondent, érodant leurs rives, comme pour s'échapper. Le Râteau rougit aux dernières lueurs, puis c'est au tour du ciel.
Challenge une photo et quelques mots par jour : 182/365 - 1 juillet
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