Le Cri
Aujourd'hui, je pourrais sans doute vous faire un paragraphe sur l'agacement ou la frustration. Mais la première partie de cette journée mérite, je crois, d'être occultée.
Me voici donc, de retour à la maison, à tourner dans le jardin pour regarder si, des fois, mon inspiration ne serait pas tombée dans un recoin. Manifestement, non. Je sors un peu comme une somnambule, en mode touriste, objectif en bandoulière, dans l'idée de prendre des oiseaux en photo, ou des fleurs, peut-être. Quelque chose, quoi ! Arrivée devant les terriers en bord de route, je suis curieuse d’explorer, pour une fois, le haut du talus. Je me faufile dans les broussailles renaissantes, trouve un certain nombre de traces, de déchets, et d'orchis géants tout frais, et me dis que ce serait une place sympathique pour un piège photo à l'occasion. Un geai s'arrête juste au-dessus de moi, une branche dans le bec.
Je continue mes prospections... : mes pas me mènent au petit bois collé contre un gué – encore un. De temps en temps, le matin, des écureuils s'y poursuivent dans les hautes branches. Mon œil est immédiatement attiré par une loge – j'en vois partout maintenant, il me manque juste la patience pour savoir si elles sont habitées ! Un pic épeiche crie un peu plus loin. Mon pantalon mauve et ma polaire grise se fondent assez mal dans le décor, mais un buisson conciliant me fait un peu de place. J'attends. Rien. Plus loin, des oisillons s'égosillent. En suivant les piaillements frénétiques, je découvre deux arbres troués, qui abritent... des étourneaux ?! Je ne savais même pas qu'ils pouvaient nicher dans des loges... À l'arrière-plan, une grosse chose poilue grimpe sur un arbre bien trop maigre, et des oiseaux s'affolent. Au loin, des églises carillonnent. Je pourrais rester une semaine dans ces quelques mètres de verdure touffue, mais il est temps de rentrer.
C'est là que les bons plans d'Ambre ressurgissent : "Tiens, je n'ai jamais tenté de descendre par le gué !" Maintenant qu'il est à sec... Et hop, me voilà au fond. D'abord, c'est bien tassé, presque plat. Une petite marche, quelques gros cailloux... La forêt vert pomme se referme en une voûte drue au-dessus du goulet. Puis vient une marche un peu plus haute, qui donne sur un passage embrouillé. Après une hésitation, je saute. À quatre pattes, je traverse un rideau de ronces et tout un tas d'autres choses verdâtres et très attachantes. Un nuage de bestioles volantes s'écarte à mon passage. Une nouvelle marche. Sur les côtés, les rives raides et croulantes donnent sur des propriétés privées. Encore une marche, plus haute. J'ai de moins en moins intérêt à devoir faire demi-tour... Un ressaut rocheux encore un peu plus haut... Et ouf, me voilà dans une portion connue, juste au-dessus d'une route. Avec dans les cheveux une collection de brindilles et dans l'appareil cette photo naturaliste d'étourneau.
Challenge une photo et quelques mots par jour : 110/365 - 20 avril