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Ambre de l'AlPe ~ Photographies

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  2. 2021 - 365

2021 - Une photo par Jour

Challenge 2021 : faire une photo "Nature" et écrire un texte chaque jour !
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  • Vervue

    Vervue

    L'année 2020 est passée comme un bolide. Tout en montagnes russes : des hauts et des bas qui défilent, se croisent, des bourrasques d'émotions fortes en pleine gueule, qui se succèdent ; si vite. Quelques ralentissements, des instants de respiration en atteignant les cimes, juste le temps d'un basculement avant de reprendre une course vertigineuse. Des rires et des haut-le-cœur. Et pourtant, en 2020, le monde s'est mis sur pause. Une toute petite chose est venue chambouler des certitudes, en étayer d'autres. Un grain de sable dans les rouages, la possibilité de freiner la machine, de prendre du recul, peut-être, enfin. Une chance de lever la tête du guidon pour regarder plus loin et voir le mur. Peut-être à temps pour freiner. Inventer pendant un "après", mieux que l'"avant". Ou pas. Vite, chacun a voulu reprendre le cours de sa vie. Parce que c'est bien de faire des efforts, mais il ne faudrait pas que ce soit trop handicapant non plus. On a des entreprises à faire tourner, des familles à nourrir, une économie "verte et solidaire" à relancer à grand coups de chiffres anonymes et énergivores. Du pain sur la planche. Le grain de sable s'est incrusté. Les rouages ont repris leur mouvement. Un peu plus saccadé. Grippé. Avec des soubresauts, des arrêts impromptus, des accélérations précipitées. Quelques ratés. Je vous souhaite une année 2021 sereine et positive. Émerveillons-nous de la beauté de la Terre... Rêv'éveillons nous pour trouver des solutions à plus long terme, histoire que la société tourne aussi rond que la belle planète qui nous accueille, et s'y accorde. Challenge une photo et quelques mots par jour : 1/365 - 1 janvier

  • Envolée avec des Ombres

    Envolée avec des Ombres

    Aujourd'hui, je trie des affaires dans la maison d'un grand-père. Tout est vite sens dessus dessous : chaque tiroir révèle son lot de bazar et de trésors. La tâche semble infinie. Je redoute ce moment où, la saturation aidant, l'envie de tout jeter commencera à se faire sentir. Chez moi, qui garde ou donne "tout ce qui peut encore servir", il y a un vaste délai. Une patience en forme de refus de gaspiller. Mais, inévitablement, je finis par me sentir submergée. Il est temps de prendre l'air. Une bise glaciale déferle entre les champs détrempés et le ciel uniforme. Hier, la neige a habillé les hauteurs, mais les plaines sont restées embourbées. J'erre au bord d'une route de campagne. Un plan d'eau à droite. Une grande aigrette s'envole dans un pré voisin. Des merles et des mésanges piaillent dans les haies. Quelques oies naviguent négligemment entre les colverts, soulevant parfois la tête pour envelopper l'étang d'un bruit de klaxon moqueur. L'éclair bleu métallique d'un martin pêcheur longe la rive. Finalement, je m'arrête, hypnotisée par le vol si particulier d'un simple petit essaim d'étourneaux. Challenge une photo et quelques mots par jour : 2/365 - 2 janvier

  • Coup de Théâtre

    Coup de Théâtre

    L'asphalte défile. Des pâturages, des clôtures, des champs boueux. Des baraques, des arbres, des bouts de plastique. Quelques hérons qui pataugent, des buses plantées sur des piquets, un vol de cigognes. Des silhouettes camouflées, des aboiements, des coups de feu sourds. Je me sens apathique, nonchalante, inefficace. Quelques minutes de détour et nous atteignons le bout d'une route. Un sentier s'allonge jusqu'à un petit pont grillagé devant une cascade. Autour, les branches dégoulinent de mousse. L'effet brumisateur géant me ravive : je galope, m'enthousiasme, m'approche au plus près du jet. Depuis l'arrière, les ruissellements prennent une autre ampleur. Le vacarme de l'eau submerge tout, des gouttes imprévisibles bondissent du plafond stratifié. La foule des arbres décharnés salue de l'autre côté du rideau. Challenge une photo et quelques mots par jour : 3/365 - 3 janvier

  • Infrarouge

    Infrarouge

    Du blanc. Le jour se lève au-dessus de Grenoble. Le ciel grisonne, soulève paresseusement quelques bourrelets gelés, découvrant des pentes immaculées. À nouveau, la chape de nuages s'affale. Puis se redresse un peu. Je colle le nez aux fenêtres du boulot. Car oui, en ce moment, je suis aussi salariée. Je fabrique et emballe des livres photo – il y a pire n'est-ce pas (!) – pour quelques temps encore : au moins cette année, sans doute. Un peu de piment en plus dans le challenge... En fin de journée, je prends le chemin des bois, en contre-haut de chez moi. Le ciel se frotte toujours aux falaises sur lesquelles la forêt bute. Je sais que certains sommets dépassent, mais il est bien tard pour monter. Quelques centaines de mètres, et les buissons se couvrent de gouttelettes. Les plus gros arbres esquissent des formes tentaculaires, blanchies, dans le fatras brunâtre des ramures. Personne. Rapidement, les branches deviennent blanches. Les troncs saupoudrés s'enfoncent dans un tapis de fougères roussies. Plus haut, un pic épeiche cogne dans le silence. Quel plaisir de le recroiser ! Ce bosquet transi contraste avec le sol noir et les rocs qui s'abîment dans l'atmosphère chargée. Challenge une photo et quelques mots par jour : 4/365 - 4 janvier

  • Le Bonheur des purs

    Le Bonheur des purs

    Quelques flocons virevoltent dans le faisceau de ma frontale. Je leur souris. Quoi de mieux pour commencer la journée ? ... L'après-midi est déjà bien avancé lorsque je prépare un sac photo à l'arrache et plonge dans la voiture. Ce doit être la première fois en plus d'un an que je prends un véhicule motorisé pour une sortie personnelle en montagne. L'an dernier, tout démarrait à vélo, dans le cadre du projet lié à la bourse Iris – et de mes convictions. Cette année, le challenge est une bonne excuse : je vais m'autoriser quelques écarts. Rapidement, les arbres sont saupoudrés. Un décor de film. La balade commence bien : une piste damée, et vite un panneau "interdit aux piétons". Arg. Demi-tour : la trace se faufile dans la forêt meringuée. Je fonce, m'enfonce, souffle, patauge. Il faudrait vraiment qu'un de ces jours j'apprenne à skier ! Le soleil se couche dans à peine une heure. Le brouillard se teinte vaguement de bleu. J'émerge entre deux vagues, devinant à l'horizon quelques écueils blanchis. Une couleur rosâtre semble imprégner la pente juste au-dessus. Trois skieurs donnent l'échelle, points qui coulissent un peu plus haut. Le rose se fait plus franc. Puis carrément fluo. Les skieurs s'arrêtent, contemplent, sortent leur téléphone. Je ne suis pas encore sur la crête, j'admire, hésitant à tout sortir ici, maintenant. J'extrais le boîtier, le trépied, fais une photo qui ne ressemble à rien, me résous à continuer. Trépied sur l'épaule, bâtons dans une main, un pull coincé dans une sangle, je marche entre les traces de descente. La neige retient mon poids, puis s'effondre : j'en ai jusqu'aux genoux, et l'impression de poser les pieds sur une savonnette : le fond s'esquive à chaque pas. Enfin me voilà sur la crête. L'Ouest est encore en sang, mais l'heure bleue enveloppe déjà le reste du paysage. La nuit tombe. Tout est glacé et calme. P.S. : je regrette de ne pas pouvoir vous partager une photo de ma tête en rentrant : j'ai moi-même ri de ma tignasse hirsute et blanche ! Challenge une photo et quelques mots par jour : 5/365 - 5 janvier

  • Bloody Mary

    Bloody Mary

    Aujourd'hui, l'océan de nuages est encore monté d'un cran. Les graphismes de la falaise peinent à émerger. Sporadiquement, une suite de lignes tordues qui s'entrechoquent donne une structure au blanc vaporeux. Un genre d'armature pour soutenir les nuées. Je prends à nouveau le chemin des bois : l'église, la route qui grimpe, le Ford Transit militant couvert de slogans... le panneau "expression libre", les escaliers longés de trottoirs, le vieil arbre calfeutré à la mousse jaunâtre, la dernière maison. Il n'a pas reneigé, mais les grosses branches tressent toujours leurs entrelacs blanchis. Le grognement d'une tronçonneuse résonne. Un rouge-gorge se pose à quelques mètres, m'observe, s'envole. Des mésanges se répondent, et, pas si loin, le pic épeiche tourne autour d'un tronc. Je poursuis vaguement une piste d'ongulés, décide de monter voir plus haut. Des pépiements semblent s'échapper d'une bosse, juste au-dessus. Ou juste après. Ou un peu plus loin. Ou... L'obscurité gagne du terrain. Dans le fond, la ville s'allume. Un froufrou d'ailes derrière moi : un rouge-gorge grappille quelques baies dans un arbuste. Il cabriole, pirouette, volette. Redescend sur le sentier casser sa graine, fonce en chercher une autre. Encore une... et hop, le voilà disparu. Challenge une photo et quelques mots par jour : 6/365 - 6 janvier

  • Incursion dans l'Incertitude

    Incursion dans l'Incertitude

    En rentrant, j'ai trouvé dans ma boîte mail une mise en demeure des impôts pour ne pas avoir retourné le formulaire qu'ils m'avaient envoyé. Ce formulaire, je ne l'ai pas retourné car le premier encadré de la notice explicative indiquait "Cette déclaration ne concerne que les créations ou reprises d'établissements redevables de la CFE [...]" Comme je suis restée moi-même l'an dernier et que je n'ai ni créé, ni repris une autre entreprise, j'en étais restée là. En lisant plus attentivement les informations me concernant, il semblerait plausible que je sois pour eux active dans le secteur du "nettoyage des rues et déneigement". Je me disais bien que j'avais loupé ma vocation (!). Le temps d'envoyer une réponse interrogative sur le pourquoi du comment, de rejeter un œil à la falaise toujours couronnée de gris dehors, de consulter des webcams pour finalement décider de retourner me perdre en forêt... La falaise se découvre. Changement de plan. Quelques rayons dorés transpercent la mer de nuage dans la montée. Au début du sentier, un orange persistant stagne à l'horizon. Puis les pentes me camouflent la vue. Graduellement, la forêt se métamorphose. À la neige s'ajoute le givre, une dentelle d'aiguilles impalpables défiant la gravité. C'est si beau... Je voudrais retenir mon souffle de peur que tout s'envole. Les cristaux de glace s'allongent encore. Quelques images rapides d'un groupe de sapins, "au cas où". J'aurais envie de rester là des heures. Soudain, des voix. C'est bruyant, des humains, quand on y pense. Une discussion enjouée, qui sort de nulle part. Les voix arrivent en haut avant moi. Le soleil est déjà couché, la crête touche le fond de la mer de nuages, de la ville émane une lumière orange et sinistre. Deux gars discutent –toujours – sur un monticule. J'essaye en vain de croiser un regard, puis les contourne avec la discrétion d'un pachyderme. Ils ne semblent pas me voir. Quelques minutes plus tard, ils me croisent – à genoux dans un lacis de troncs – et me saluent. "Vous ne nous avez pas pris en photo ? - Non... - Non c'est parce qu'on était nus." Ah. Quelle curieuse journée, décidément ! Un peu plus loin, l'une des voix s'interroge... : "Imagine elle aurait dit oui... t'aurais fait quoi ?" Challenge une photo et quelques mots par jour : 7/365 - 7 janvier

  • … Deviendra Baobab • Rêvalités

    … Deviendra Baobab • Rêvalités

    Aujourd’hui, j’ai fait ma MA. Mirliton Aphone ? Marche Automatique ? Myopie Amorphe, Misogynie Archaïque ? Non non, simplement Mauvaise Action. On parle tant des "BA" ; comme si d’un mouvement de baguette magique elles pouvaient faire l’impasse sur notre passif douteux. Est-ce qu’une "MA" estompe tout ce qu’on a fait de positif ? Aujourd’hui, je suis allée à la déchetterie. Vous savez, cet univers surréaliste constellé de bennes et de mecs qui vous disent "Faut pas y craindre, on va tout y enfouir !" ou encore "Vous ne savez pas où mettre ? Encombrants." "Non non, on ne peut rien vous laisser récupérer !" Ce vortex nébuleux qui engouffre sans sourciller nos cadavres et nos ébauches de remords pour nous permettre de renter à la maison avec une conscience toute neuve, libérée, vierge. Ce lieu improbable, je l’ai découvert vers mes 20 ans. C’est le seul endroit où des envies meurtrières m’étreignent. Dans les réceptacles gisent au cœur du chaos des meubles utilisables, de la vaisselle neuve, des tréteaux convoitables, des fenêtres intactes mal dimensionnées, des jeux dépassés. Tant de merveilles irrécupérables qui s’entassent, s’abîment avant de disparaître. Reset. Comme si nos déchets, en détournant un instant le regard et en les posant sur la case "Evanesco" allaient soudain, d’eux-mêmes, se dissoudre dans l’éther. Comme si la case "récup’" ne valait pas le détour ou faisait perdre des points d’estime. J’aime beaucoup les contes de fées, mais je doute que les choses se passent tout à fait ainsi. Mais j’y suis allée. En essayant de limiter la casse, en tentant de trier au mieux. Bien plus que l’auraient fait certains ; bien moins que d’autres sans doute. En espérant qu’un de ces jours, la neige en fondant ne dévoile plus aucun résidu navrant. Qu’on saisisse une occasion de comprendre que le meilleur déchet, c’est celui que l’on ne produit pas. En attendant, dehors s’étend un spectacle d’une pureté fascinante… Une succession de sculptures de brume et de givre. Challenge une photo et quelques mots par jour : 8/365 - 8 janvier

  • Lambeaux d'Automne

    Lambeaux d'Automne

    Ce matin, je me lève du mauvais pied. La neige fondue tartine une compote détrempée sur la chaussée. Le roues de mon vélo y creusent des sillons liquides. J'arrive maussade dans mon local désordonné. Les premières paroles échangées n'améliorent pas mon aigreur. Comme un mantra, je me répète une citation de Bouddha : "Rester en colère, c'est comme saisir un charbon ardent avec l'intention de le jeter sur quelqu'un ; c'est vous qui vous brûlez." C'est vrai, à part à propager une onde de mauvaise humeur, à quoi me servira de faire la tronche derrière mon masque ? En fin de matinée, je retrouve un bout de sourire en rangeant. Puis la journée cavale trop vite... Voilà qu'il est déjà 16h. Sac au dos, j'enfourche ma bicyclette pour... Oh, dans la haie, une mésange bleue cabriole ! Elle est si mignonne ! Le sac est vite reposé à l'intérieur. La mésange s'est esquivée. À la place, à quelques pas de la porte, un merle et un moineau se content fleurette, des reliques de feuillage en guise d'ombrelle. Jusqu'à la nuit, je joue à cache-cache avec les passereaux sous la pluie. Une petit moment de plaisir, chaleureux, tout en demi-teintes et en gazouillis dans la brume. Challenge une photo et quelques mots par jour : 13/365 - 13 janvier

  • Jardin d’Hiver

    Jardin d’Hiver

    Quelque part sur un autre plan, une radio s’allume. Je me concentre. Je suis en train d’assister à une conférence du mouvement des colibris sur la thématique de l’accueil des personnes âgées dans une société écologiquement responsable. Il fait sombre, une scène est éclairée, un courant d’air doux et estival enveloppe l’assemblée. Au premier rang, sur une toute petite chaise de bois paillé, mon cousin est happé par les discours. La soirée s’éternise. Les informations sont cruciales mais je n’arrive plus à m’en rappeler. Tout à coup, je me rends compte que la plupart des spectateurs est endormie ou a disparu. La lumière tamisée éclaire des rangées de chaises vides. La radio lointaine dépêche un fatras de nouvelles. Des histoires de Trump, de covid, de vaccin, de froid, de Twitter. Actualités d’un monde aux abois. Ah oui. On vide une maison aujourd’hui. La radio, c’est le réveil. À travers le volet, l’aurore se fraye timidement un passage. À moins que ce ne soient les lampadaires. Des oiseaux sautillent déjà discrètement dans la haie. Au loin, un chien jappe. Le froid a tout engourdi. Des corneilles patrouillent, des pies bavardent, des mésanges discutent. Au moindre son humain, tout retient sa respiration. Puis le ballet des oiseaux reprend. À nouveau un petit rouge-gorge, brièvement, avant de décoller. Challenge une photo et quelques mots par jour : 9/365 - 9 janvier

  • Cul-de-Sac

    Cul-de-Sac

    Ce matin, je m’attaque au déblayage d’un cabanon de jardin. Moi-même experte en accumulation et bazar de formes variées, j’ignorais pourtant qu’un lieu si étriqué pouvait contenir une telle quantité de choses. Le petit local est recroquevillé sous un vieux chêne. Le froid a givré les herbes ; des ailettes de cristal hérissent les surfaces métalliques. Sculptures éphémères jusqu’au premier rayon… À l’intérieur, un magot hétéroclite. Une chaussure, à l’abandon, a servi de poubelle de table à un rongeur. À l’arrière s’entasse une collection de pots de fleurs vides. … J'inspecte. Je creuse. Enfin, j’aperçois le fond du monticule : un vieux seau blanc en équilibre sur deux jardinières en terre. Une fissure au fond du seau. Irrégulière, grignotée. Tiens, une souris a goûté. Mon regard est attiré par un mouvement. D’une des cavités circulaires d'une jardinière dépasse un museau hérissé de moustaches. Le petit nez tremble, frémit, disparaît. Resurgit. Des petits doigts pointus se reposent sur le rebord, le museau ressort. Un œil noir se colle au judas. Un autre nez vient pousser le premier, pour mieux voir. Le premier replonge. Sort par le second trou. Mon pot – qui est manifestement une chambre cosy – est désormais orné de deux nez moustachus et tremblotants. Irrégulièrement, les nez s’interchangent, s’effacent, des petits yeux scrutent par les trous. Je suis navrée de mettre à la rue les habitants de ce nid douillet l’un des jours les plus froids de l’hiver… La jardinière y est encore. Laissons-leur le temps de déménager. Challenge une photo et quelques mots par jour : 10/365 - 10 janvier

  • Le Cimetière des Éléphants

    Le Cimetière des Éléphants

    En quelques jours, le froid a figé les étangs. Quelques hérons gonflés déambulent encore autour des fossés gelés ; les autres ont déserté. Le ciel grisâtre écrase le paysage déjà presque plat. Depuis longtemps, je voulais aller voir ces arbres incroyables. Presque aucun détour : l'occasion est trop belle. Le soleil, qui a fait grève toute la journée, effleure un tertre rachitique un peu plus loin. Me voici allongée devant une patinoire qui enserre une forêt de pattes d'éléphants, encore ébouriffée de quelques touffes de poils rêches couleur mammouth saturé. Le relief des troncs est fascinant. La mousse et le lichen laissent nues quelques parcelles d'écorce plissée. Une vieille peau maculée et ridée. Les troncs rectilignes s'élargissent et se froissent vers le bas en touchant la glace. La lueur de l'heure dorée se réverbère sur la surface durcie. Au fond, dans les roseaux, quelques canards se marrent. Comme un clin d'œil, un petit rouge-gorge se pose juste à côté de moi. Challenge une photo et quelques mots par jour : 11/365 - 11 janvier

  • Les Crocs de l'Abîme

    Les Crocs de l'Abîme

    Les premiers flocons arrivent plus tôt que prévu. Blanc sur gris. Aujourd'hui, ce n'est pas vraiment mon jour. J'ai commencé par oublier mes chaussures de marche et remonter les chercher. Au travail j'ai appris que nos cartons tout frais – pour utiliser moins de plastique lors de l'envoi des livres – ont un défaut : il faut chercher de nouvelles méthodes chronophages pour compenser... Enfin, je prends la route sous la neige. À peine ai-je marché 100 mètres que déjà, je suis engagée sur le mauvais sentier. Me voilà dans un pré, dont je finis par m'arracher en forçant le passage d'une haie entre ronces et barbelés – avant de découvrir une barrière dégagée un peu plus loin. Un pont surplombe des gorges sinueuses. Je m'insinue jusqu'au fond, lance une photo test... "Erreur : communication défectueuse entre l'appareil et l'objectif". Arf. Ce problème, rare il y a encore quelques semaines, est devenu presque systématique. Il va falloir agir. Extinction du boîtier, ... rebelote. Flûte. La troisième tentative est la bonne. ... Vite, un coup de mouchoir sur le filtre pour déloger les flocons. Mais l'appareil s'éteint : plus de batterie. Là au moins, j'ai la solution : hop, je remplace la batterie vide par une batterie de secours... vide. Et m**** ! Bon. Pas de panique. Il n'y a plus qu'à réchauffer les batteries et croiser les doigts pour que cela suffise... Me voici en équilibre sur un rocher verglacé, à jongler entre mes batteries à l'agonie, mon appareil trempé en erreur, mon mouchoir qui, rapidement, est inondé, et, touche finale : la buée. Cette fois, j'abandonne. Tant pis. Voici donc une photo loin d'être peaufinée. Je bougonne, mais les lieux étaient superbes. Géniaux, incroyables. L'eau turquoise ondoyaient entre des parois moussues dont les reliefs étaient saupoudrés. D'au-dessus, la perspective était faussée, perturbante. Vertigineuse. Des stalactites gigantesques dégoulinaient des surplombs. Sous ces lames sculptées, des stalagmites se hissaient parfois vaillamment dans le lit du cours d'eau, goutte à goutte. Juste à ma verticale, les toits donnaient naissance à un ange, modelé dans la glace translucide, les ailes grandes ouvertes. Comme prévu, le temps se réchauffe. L'essaim de flocons se fait plus compact. Un banc de brouillard s'infiltre dans le canyon alors que je quitte les lieux. Un troglodyte mignon se planque dans des racines devant mes pas. Dans la vallée, la neige tombe en un épais rideau piquant. P.S. : La prochaine fois que je sortirai dans le froid – genre demain – n'hésitez pas à me rappeler d'emporter deux batteries... pleines... ! Challenge une photo et quelques mots par jour : 12/365 - 12 janvier

  • La Danse des Ombres

    La Danse des Ombres

    Ils sont amants, ou peut-être sont-elles sœurs. Iels sont nés faînes ou glands pour finir vieilles branches. Iels veillent et s'assoupissent auprès de leurs hêtres en-chênés. Iels sont dépourvus de genre, iels existent sans papiers – et n'existeraient plus s'iels en devenaient. Je crois qu'iels s'en fichent. Autre chose à faire d'une vie en Terre. Survivre à l'hiver, danser sous la pluie, encenser la nuit. Une vie à deux, à s'enlacer, se supporter, se soutenir ; s'écarter un peu, pour se laisser vivre. Elle se déhanche, ondule, lève un bras comme pour saluer. Sa coiffe de lierre tressaute. En face, l'autre profil se lâche. Bras levés, une tignasse feuillue jetée en l'air par l'impulsion. Je m'allonge à leurs pieds. La chorégraphie s'éternise. Dans leur temps, je n'ai fait une pause que d'un quart de soupir... Plus loin dans le sous-bois magique et embrumé, un claquement alarmant résonne. Pensant à un chasseur, j'écoute, aux aguets. Dans la nature, je me sens proie. Le brouillard ne laisse rien paraître. Puis un autre craquement, plus profond, plus précis. La falaise se déleste de quelques rochers et blocs de glace. Les éboulements se multiplient, de plus en plus nets, menaçants. Le dernier se mue en un long rebondissement qui finit en dégringolade. La montagne chasse ses intrus. Je rends aux arbres leur intimité. Challenge une photo et quelques mots par jour : 14/365 - 14 janvier

  • Au-Revoir là Haut

    Au-Revoir là Haut

    Un bon moment, je papillonne autour de la maison. Des chardonnerets égayent les hauteurs des platanes. Les merles se font discrets dans les charmes. Une mésange bleue miniature se suspend fièrement dans un buisson échevelé et s'époumone. Sa tête paraît gigantesque, disproportionnée. D'un arbre à kakis émane une mélodie criarde presque continue. Un jour j'oserai demander aux voisins si je peux me planquer sous leur plaqueminier pour regarder les oiseaux faire bombance. Mais pas aujourd'hui. Au loin, vers le Vercors, une vague de nuées précède un curieux halo doré. La vague déferle. Le ciel gris se traîne par terre. Puis quelques trouées éclosent, de plus en plus haut. Un fragment de bleu se laisse même deviner. La crête, ébouriffée de résineux blanchis, paraît dans un hublot. Puis ce sont des strates de la falaise. Des peluches de coton s'accrochent au relief. Des lopin de forêt émergent d'un courant de moutonnements. Je traverse la route pour entrer dans le cimetière. Les morts, couverts de fleurs, ont une vue plus dégagée que les vivants barricadés de hautes haies. Entre les tombes, un minuscule oiseau froufroute. Mon œil s'arrête sur des noms, des dates. Curieusement, je me sens souvent sereine dans les cimetières. Tant de gens partis, tard ou tôt. Des vieillards, des gamins. Des ascètes et des fêtards ; des sages et des combattants ; des intellos et des imbéciles. Et souvent tout ceux-là à la fois. Tout finit, un jour... Au-dessus se révèle la puissance des lieux. Des éboulements dévalent toujours. Le mur, écrasant, poudré, dont les reliefs se détachent comme autant de statues, impose le respect. Challenge une photo et quelques mots par jour : 15/365 - 15 janvier

  • Le jour des Corneilles

    Le jour des Corneilles

    Ce matin, je comptais allez crapahuter au-dessus de la mer de nuages. J'avais calculé : avec un réveil à 4 h, c'était bon. ... Mais, atteinte d'une flemmardite aigüe, j'ai lâchement abandonné l'idée. À l'aurore, c'est marée haute. Les chaînes se montrent sous le plafond, parfois entre quelques remous. Des nappes floues naviguent entre deux flux. Le bleu domine. Outre-mer. Azur. Polaire. Une histoire d'interprétation et de décalage horaire. Ou simplement d'instants... Le soleil met longtemps à arriver. Il caresse d'abord la surface, loin, tout là-haut... Colore les dépressions, épouse les bosses. Dans l'éther s'opposent et se mêlent des courants froids et chauds. Comme au ralenti, l'astre déborde enfin du rempart cranté d'en face. Il se pose dessus, roule un peu, s'étouffe dans un nuage gris. Dans les branches nues, une pie fait la pitre et des corneilles croassent. Leurs voix rauques glissent dans l'air froid. Des pentes plâtrées surgissent entre deux étages. Le soleil fore les nuages. Éblouissant, cercle parfait, il fait juste la taille des oiseaux. Je me décale en catimini. La corneille penche la tête, me jette un coup d'œil interrogatif puis reprend sa position de girouette. Je mitraille : les cimes, les branches, l'oiseau. Ce n'est pas la photo la plus aboutie, ni la plus spectaculaire, de loin... mais le moment me plaît bien... Challenge une photo et quelques mots par jour : 16/365 - 16 janvier

  • Incons(is)tance

    Incons(is)tance

    Ce matin, la rue est blanche. Je bondis de joie devant la fenêtre. Hélas, j'ai des travaux virtuels qui s'accumulent. Et en ce moment, quand j'ai trop de choses à faire, je buggue. C'est à dire que, déterminée, je m'attaque à de multiples tâches simultanément, traite l’urgence tout en entamant vaguement autre chose, en déviant sur des imprévus ... et qu'à la fin, je me rends compte que je n'ai pas progressé. Et que le lendemain j'aurai encore plus de trucs à faire. Et ainsi de suite. Dans l'après-midi, sans avancée notable sur quoi que ce soit, je mets enfin le nez dehors. La pluie imbibe la neige, qui n'est plus qu'une vieille moquette mouillé. Un bout de nuage ruisselle de la Chartreuse et bute sur le haut des villages. Quelques silhouettes en imperméable marchent vite, des enfants rient et pataugent dans les bas-côtés. Un homme qui pousse une poussette en forme de remorque de vélo, un gamin endormi à l'intérieur, s'émerveille de ma protection d'appareil en sachet plastique. Des bonshommes de neige ventripotents à l'air jovial veillent leurs terrains. Quelques cyprès aux mèches rebelles donnent un peu de caractère aux ruelles, entre les haies rasées de près. J'atteins sans y penser un petit coin de bois échoué entre les quartiers résidentiels. Le brouillard est à couper au couteau. Les troncs s'étirent entre la terre blanchie et le nuage, leurs panaches de branches glabres disparaissant dans le ciel incertain. C'est beau. Les troncs mouchetés s'effacent peu à peu... Challenge une photo et quelques mots par jour : 17/365 - 17 janvier

  • Immensités Glacées

    Immensités Glacées

    Ce matin, pluie et neige ont regelé. Tout est patinoire. À votre avis, qui donc a laissé son vélo dehors ? D'abord, rien ne bouge, même pas le guidon, scellé par la glace. C'est mal barré. Les roues se décollent, le guidon tourne, les... manettes de frein ne remuent pas. Pour descendre vers la vallée, ce n'est pas pratique. Un pied sur une pédale, l'autre en guise d'accélérateur/frein – sur la patinoire, donc – me voilà enfin en route. Ça va bien finir par dégeler. Les montagnes se découvrent un peu partout, se dévoilant dans l'aube bleutée. Tout a l'air somptueux. Ma tête se perd en haut alors que mon corps s'évertue à descendre tant bien que mal. Je croise quelques oiseaux et des regards masqués. ... J'arrive en retard, en trottinette. Dans la journée, des rayons de soleil daignent revigorer – et redonner sa fonction à – mon moyen de transport. Le soir, un filet de nuage serpente lentement à mi-hauteur. Au-dessus de moi, il s'évanouit doucement avec les dernières lueurs. Ces immensités glacées, c'est juste en face de chez moi. À la fois si proches et si lointaines. Si accessibles et si inabordables. Si géniales, juste-là, à quelques pas ! Dire qu'au fond de la cuvette, là-bas en ville, nombreux sont ceux qui ne s'y risquent pas... Par peur ? Envie d'ailleurs ? La beauté fait-elle tellement partie du quotidien que l'on ne la voit même plus, confondue dans les journées moroses ? Le soleil quitte tranquillement la scène, offrant à l'hiver ses couleurs chamallow. Le rose déteint dans le violacé qui évolue peu à peu en heure bleue. L'horloge sonne six heures. Challenge une photo et quelques mots par jour : 18/365 - 18 janvier

  • Le Papillons de Babylone

    Le Papillons de Babylone

    Mes pas font un vacarme épouvantable dans le fond de neige regelé. Bonjour la discrétion ! Autant que possible, je me coule entre les bandes de terre humide... mais rapidement tout le sol est couvert d'une croute glacée. Un merle finit par me piailler une alerte bruyante. Je crois qu'il m'engueule. Des mésanges aux multiples formes se poursuivent dans un buisson touffu, l'air de rien. Je passe par le coin du chasseur. Ses traces mènent à un piège photo, fixé à hauteur avec un petit tendeur. Un de ces jours, ce serait bien que je cache un piège pour observer ce qui se trame ici ! J'évite le champ de déclenchement, n'en vois pas d'autre... Sur une bute, des pistes se croisent et se rejoignent. Chevreuils, sanglier, blaireau, renard, et un petit mustélidé. Il y en a du monde... Il va falloir que je prenne le temps d'avoir la patience d'apprendre à attendre... La cascade du dessus crachote dans un torrent engourdi. Quelques ardoises dérapent sur le toboggan neigeux. Pas de traces de chamois comme je l'espérais. Dans le fond de la vallée, les villes s'allument. L'heure bleue imprègne les montagnes... Puis le ciel... Les lumières multicolores papillonnent à travers les branches : une armée de lampions, ou un amoncellement de lucioles déboussolées. La rocade dessine un long ruban qui défile, elle me fait penser à une invasion de chenilles processionnaires. Un chevreuil aboie en contrebas. Un éclat de Lune timide éclaire mes pas. Puis les réverbères, éblouissants après l'obscurité. Challenge une photo et quelques mots par jour : 19/365 - 19 janvier

  • Quatrain

    Quatrain

    Il était une fleur au demi-jour naissant Qui tremblait, s'affolait, tourmentée par le fœhn ; Alors que les arbres, rodés et prévoyants Ne bronchaient même pas. Inquiétude de jeunes ! La fragile fleurette se dit en un souffle : "Trop tard : à peine née me voilà cisaillée... Dans un vain soubresaut en plein cœur du baroufle Je serai arrachée. À cent lieues de l'été..." Et si la nouveauté n’était pas obsolète Si le chêne au roseau n’était pas préféré Et si au fond notre douce et calme fleurette Du tumulte violent se voyait épargnée...? Challenge une photo et quelques mots par jour : 20/365 - 20 janvier

  • Laisser Couler

    Laisser Couler

    Une chose étrange que la colère. Une émotion sournoise, impétueuse, qui vous corrode de l'intérieur, en douce. On la laisse parfois s'installer, sans faire gaffe. On lui fait une petite place, par là, entre les a priori et le jugement. Elle entre en dormance. C'est une nappe de magma entre deux éruptions : on l'oublie presque car on ne la voit plus. Elle a refroidi, en surface... Quelques petites soupape de sureté sifflotent un peu de vapeur ardente dans leur coin, brûlant ceux qui s'en approchent trop. Mais il suffit d'une pichenette, une étincelle ; un maux mystérieux et soudain tout explose. Hier, j'étais en colère. C'est pas mon truc, la colère. Trop fulgurant, trop violent, trop irrémédiable. D'un coup de colère on peut briser des années de quiétude. En plus, ça se postillonne, se répand, se propage, c'est contagieux. Et trop vite on en arrive à la baston, au fusil de chasse ou au sous-marin nucléaire. Je suis plus tristesse : ce sentiment de fondre, se liquéfier de l'intérieur sans tout éclabousser. Pas génial non plus. Mais bon, ça arrive. Aujourd'hui, je remonte chez moi par les chemins de traverse. Il en reste tellement que je n'ai pas sillonnés ! Au pif, je m'infiltre entre deux maisons : une sente longe le ruisseau des gués. Les rives instables s'érodent dans le cours d'eau, les arbres s'entrechoquent tout autour, secoués par les rafales. Je croise une dame entre deux âges. Ses yeux pétillent : "Vous connaissez ? C'est la première fois que je passe par là. On se croirait en pleine montagne ! J'ai marché au hasard... Il y a tellement de chemins à découvrir ! J'adore." Ses mots illuminent ma journée – les derniers résidus de colère s'évaporent. Au fond de la rigole, la rivière rebondit de palier en palier. Des bouffées de feuilles m'arrivent en pleine figure. J'aime beaucoup cette ambiance cloîtrée, dissimulée entre les pentes éboulées couvertes de mousse et de lierre. Challenge une photo et quelques mots par jour : 21/365 - 21 janvier

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